mercredi 8 décembre 2021

Je ne veux pas penser à toi au passé...



Je ne veux pas penser à toi au passé. Je veux continuer de parler de toi au présent, car malheureusement je ne pourrai pas le faire au futur…

L’être humain est un peu con parfois. Il oublie. Il oublie vite. Il oublie quand le temps passe. Il oublie quand il pense que tout va bien…

Puis il tombe dans le tourbillon de la vie et ne voit plus rien.

Pourtant, le temps défile. Le temps file rapidement. Il me rappelle que le froid s’installera et qu’il sera dans l'indicatif omniprésent.

Je ne veux pas penser à toi au passé. Je veux continuer de parler de toi au présent, car malheureusement je ne pourrai pas le faire au futur…

Je te regarde encore avec mes yeux de petites filles, toi mon héros des héros. Je te regarde toujours de mes yeux bleus pétillants comme si j'avais huit ans. Toi, qui a été le premier homme de ma vie. Toi qui es encore le plus important. Toi qui ne m'a jamais laissé tomber.

Les traitements ont agi sur toi comme un ravage. Tu as perdu beaucoup de poids dans les deux dernières semaines. Tu titubes. Tu oublies certaines choses. Tes yeux manquent de leur éclat passé. Ton visage a changé. 

Je te trouve encore beau.

Quand je te vois, je veux rire. J'ai envie de te faire oublier. Je me force, je me force en crisse pour pas pleurer. Mais cette fois, ça été comme une claque en pleine face. J'ai pas été capable de rire et la seule chose d'intelligente que j'ai trouvé à dire c'est, câlisse. Puis j'ai craqué...

Je ne me rappelle plus la dernière fois que j'ai pleuré comme ça.

Cancer, maudit cancer, tu répètes souvent. Sortant de ta bouche comme une mélodie, limite poésie satirique.  

Un diagnostic, qu’est-ce que c’est ? Des symptômes, de l'incompréhension, une maladie, une limite de temps…

Ça nous plonge dans le moment présent, ça nous ramène directe dedans. C'est plate, mais la maladie ça rassemble, ça unit. Cependant, le temps reste conditionnel.

Il y a la peur. La peur de manquer quelques choses. La peur d’oublier. La peur de ne plus exister. Il y a aussi les questions. Toutes ses questions que nous nous sommes jamais posées. Il y a les questions de vie et les questions de mort, douce oxymore.

Je ne veux pas penser à toi au passé. Je veux continuer de parler de toi au présent, car malheureusement je ne pourrai pas le faire au futur…

Depuis peu, tu dors. Tu dors tout le temps. Ta morphologie a changé. Ton corps à besoin de se reposer. Ton corps exige une pause. Il est fatigué.

Ça fait déjà un petit moment, je n’arrive pas à écrire. Je n’arrive pas à mettre des mots sur ce que je ressens. En réalité, je ne sais pas si je peux encore sentir quelque chose. Maudite protection. J’ai remis mon scaphandre pour plonger dans le plus-que-parfait. Cet endroit où l’être humain est un peu con. J’ai l’air insensible, que rien ne m’affecte, que tout est beau. Je suis consciente que le pire s’en vient, mais je me sauve dans cette figure de style où il fait bon rire ici et maintenant. Là, où la douleur n'existe pas. 

Le temps défile. Le temps file rapidement. Le tourbillon de la vie me rappelle que je dois en profiter pleinement maintenant et ne pas remettre à demain, car des demains, il n'y en aura sûrement pas beaucoup. 

Je ne veux pas penser à toi au passé. Je veux continuer de parler de toi au présent, car malheureusement je ne pourrai pas le faire au futur…

J'étais là. Je suis là. Je suis encore là pi je vais tenir ta main. Puis quand tu auras envie de la lâcher, je serai là pour te bercer.

Passé, présent ou futur, je t'aime papa.